Ornela Vorpsi : Vert venin Il y a des romans ou des récits (puisque on ne fait pas toujours la différence entre les deux !) dont le titre intrigue et dont on se demande bien ce qu'il recouvre exactement ! Pourtant la quatrième de couverture est parfaitement explicite (ce qui est loin d'être toujours le cas !) sur "Vert venin", titre étonnant en soi, car associer une couleur à un poison est plutôt rare ... On est d'abord séduit par la démarche de la narratrice, une espèce d'esprit de tiroir, qui part de sa "peur" de l'avion pour déboucher au fil des réflexions qui s'enchaînent sans d'autre lien que l'association d'idées, sur un voyage qu'elle fait à Sarajevo ... ce qui la rapproche de son Albanie natale ... Séduits, certes nous le sommes au début, car son humour allie à la fois l'originalité et le grinçant en demi-teinte ... mais on s'en lasse vite, d'autant que de cette partie du monde que tant d'évènements contemporains ont marquée, elle ne dit que très peu et ne retient que le quotidien qui la marque ; d'où cette déception du lecteur qui s'attend à autre chose, sans doute plus de "sensationnel" ou en tout cas une réflexion plus approfondi sur tous ces chamboulements qui ont marqué les Balkans depuis un siècle ! Mais mise à part cette réserve, ce récit se lit avec plaisir, parce qu'il est bien écrit (mérite ou non d'une bonne traduction ?), parce qu'il donne aussi envie de se plonger dans ces cultures dites minoritaires et qui sont écrasées par l'omnipotence de quelque-unes occidentales ; et c'est bien plus qu'à un plaidoyer pro domo que se livre l'auteur, c'est un réel appel qu'elle lance pour la reconnaissance de la culture et de l'identité culturelle de tout un chacun. Et cet appel est d'autant plus poignant qu'il est lancé par une "apatride" originaire d'Albanie, écrivant en italien et vivant à Paris.