Bandi, un surnom en coréen, la luciole.
Sous ce pseudonyme, l'auteur veut en quelques nouvelles apporter un éclairage sur la société nord-coréenne sous la dictature de la dynastie des Kim. Il fait froid dans le dos, cet état des lieux de tout un peuple, caricature à l'extrême du socialisme et du communisme, cet idéal de générosité et de solidarité se trouvant complètement dénaturé, dévoyé, pire totalement renié, au seul profit d'une caste.
Ce qui révolte sans doute le plus le lecteur c'est bien cette impitoyable contestation : cette base du communisme, l'exploitation du travailleur et son aliénation par les quelques privilégiés qui détiennent le pouvoir économique, sont devenues asservissement et annihilation de toute la population. La dynastie des Kim est devenue synonyme d'une des pires dictatures que le monde n'ait jamais connue.
Schéma théorique, abstrait propre à satisfaire tous ceux que la géopolitique fascine ! Mais comme il devient alors poignant et profondément humain dans les nouvelles de Bandi.
Toutes nous parlent de ces désirs fondamentaux qui animent chaque humain, pouvoir vivre selon les aspirations de son cœur, selon cette liberté fondamentale. Et ce ne sont pas de vains mots ! Le ton est donné dès la première de ces nouvelles, « L'orme-trésor » : en forme de parabole, et avec un bon sens populaire, il nous est montré qu'un homme perd tout lorsqu'il perd ses propres repères ; c'est, hélas, le but de toute dictature que de déboussoler le citoyen pour s'en rendre totalement maître. Idée encore plus développée dans cette autre nouvelles intitulée « Pandémonium », avec cette histoire, autre allégorie de la réalité : un sorcier qui avait jeté un sort à sa tribu, dont tous les membres passaient leur temps à rire donnant ainsi l'illusion d'un bonheur total et permanent ; mais pour masquer à la vie des passants extérieurs l'épouvantable réalité dans laquelle il les tenait, il avait fait ériger des palissades très hautes … Le travail ! Cette notion, à la base même de la réflexion de nombre d'idéologies, du libéralisme le plus exacerbé au socialisme le plus intransigeant, occupe une place centrale dans ces nouvelles : il en devient effrayant, car il n'est pas présenté comme librement choisi par l'individu, ni a fortiori comme une source d'épanouissement (1), non mais seulement comme une nécessité dont les résultats ont été définis non pour satisfaire les besoins réels de la population mais par quelques technocrates inféodés au Parti et son secrétaire Général et permanent de père en fils … Tellement significative à cet égard la dernière nouvelle « Champignon rouge » (dont le titre, lui aussi tellement allégorique, dans ce qu'il suggère !). A ce grand Lavage de Cerveaux (Marx (2) disait à propos du travail dans les sociétés capitalistes que le travailleur est tellement aliéné qu'il en arrive à aimer sa propre aliénation. Et dans cette nouvelle, la société nord-coréenne est présentée de la même façon : le Parti se comporte comme le plus intransigeant des patrons capitalistes.
Et bien évidemment cette déshumanisation passe inéluctablement par la suppression de tout sentiment amoureux … qui ne soit pas conforme avec les vues du Parti, cet organisme, construction impitoyable forgée par le dictateur !
Pessimistes ces nouvelles ? Non, car celui qui les a écrites sait nous montrer aussi qu'il y a d'autres alternatives, d'autres comportements possibles, et que la soumission absolue du peuple opprimé n'est pas irréversible ! Ce n'est pas à une critique implacable du communisme que se livre Bandi ; ou alors, serait-ce que les nations, les peuples d'Asie (la Chine de Mao incluse) se seraient réappropriées les notions mêmes de socialisme et de communisme développées par Marx et les auraient accommodées selon les caractères desdits peuples, dont les valeurs traditionnelles seraient complètement différentes des nôtres ? Quoi qu'il en soit le lecteur est saisi alors d'un immense vertige : si la règle du « tout est relatif » doit s'imposer, y compris dans ce qui régit chacune des sociétés, alors oui, l'aspiration à une harmonie universelle devient un rêve, une utopie, et l'individualisme, réalisé collectivement dans un groupe, impossible à vaincre !
Car ce qui frappe aussi à la lecture de ces nouvelles c'est que, si elles s'appliquent à la société nord-coréenne, elles peuvent aussi très bien être transposées à nos sociétés occidentales et que la tentation d'un Etat fort, et d'un capitalisme sauvage n'a jamais été aussi forte ! (3)
A quel triste monde ne nous préparons-nous pas ?
-1 ce n'est pas le lieu ici de développer toutes ces notions concernant le travail, pourtant je me sens si proche de cette théorie fortement décriée, mais qui pourtant à analyser de près n'est pas forcément une utopie, celle préconisée par quelques socialistes français du 19ème siècle « travailler deux heures par jour, ce serait suffisant … à rapprocher aussi de cette étude américaine où le maximum que peut supporter un humain pour son équilibre est de travailler au plus 35 heures par semaine …
-2 Je sais bien que c'est maintenant très politiquement incorrect de parler de ce philosophe allemand, pourtant il n'a jamais été autant d'actualité !
-3 Ceci nécessiterait un trop grand développement qui n'est pas de mise dans le cadre de ce seul aperçu critique sur es nouvelles de Bandi.
Bandi, un surnom en coréen, la luciole.
Sous ce pseudonyme, l'auteur veut en quelques nouvelles apporter un éclairage sur la société nord-coréenne sous la dictature de la dynastie des Kim. Il fait froid dans le dos, cet état des lieux de tout un peuple, caricature à l'extrême du socialisme et du communisme, cet idéal de générosité et de solidarité se trouvant complètement dénaturé, dévoyé, pire totalement renié, au seul profit d'une caste.
Ce qui révolte sans doute le plus le lecteur c'est bien cette impitoyable contestation : cette base du communisme, l'exploitation du travailleur et son aliénation par les quelques privilégiés qui détiennent le pouvoir économique, sont devenues asservissement et annihilation de toute la population. La dynastie des Kim est devenue synonyme d'une des pires dictatures que le monde n'ait jamais connue.
Schéma théorique, abstrait propre à satisfaire tous ceux que la géopolitique fascine ! Mais comme il devient alors poignant et profondément humain dans les nouvelles de Bandi.
Toutes nous parlent de ces désirs fondamentaux qui animent chaque humain, pouvoir vivre selon les aspirations de son cœur, selon cette liberté fondamentale. Et ce ne sont pas de vains mots ! Le ton est donné dès la première de ces nouvelles, « L'orme-trésor » : en forme de parabole, et avec un bon sens populaire, il nous est montré qu'un homme perd tout lorsqu'il perd ses propres repères ; c'est, hélas, le but de toute dictature que de déboussoler le citoyen pour s'en rendre totalement maître. Idée encore plus développée dans cette autre nouvelles intitulée « Pandémonium », avec cette histoire, autre allégorie de la réalité : un sorcier qui avait jeté un sort à sa tribu, dont tous les membres passaient leur temps à rire donnant ainsi l'illusion d'un bonheur total et permanent ; mais pour masquer à la vie des passants extérieurs l'épouvantable réalité dans laquelle il les tenait, il avait fait ériger des palissades très hautes … Le travail ! Cette notion, à la base même de la réflexion de nombre d'idéologies, du libéralisme le plus exacerbé au socialisme le plus intransigeant, occupe une place centrale dans ces nouvelles : il en devient effrayant, car il n'est pas présenté comme librement choisi par l'individu, ni a fortiori comme une source d'épanouissement (1), non mais seulement comme une nécessité dont les résultats ont été définis non pour satisfaire les besoins réels de la population mais par quelques technocrates inféodés au Parti et son secrétaire Général et permanent de père en fils … Tellement significative à cet égard la dernière nouvelle « Champignon rouge » (dont le titre, lui aussi tellement allégorique, dans ce qu'il suggère !). A ce grand Lavage de Cerveaux (Marx (2) disait à propos du travail dans les sociétés capitalistes que le travailleur est tellement aliéné qu'il en arrive à aimer sa propre aliénation. Et dans cette nouvelle, la société nord-coréenne est présentée de la même façon : le Parti se comporte comme le plus intransigeant des patrons capitalistes.
Et bien évidemment cette déshumanisation passe inéluctablement par la suppression de tout sentiment amoureux … qui ne soit pas conforme avec les vues du Parti, cet organisme, construction impitoyable forgée par le dictateur !
Pessimistes ces nouvelles ? Non, car celui qui les a écrites sait nous montrer aussi qu'il y a d'autres alternatives, d'autres comportements possibles, et que la soumission absolue du peuple opprimé n'est pas irréversible ! Ce n'est pas à une critique implacable du communisme que se livre Bandi ; ou alors, serait-ce que les nations, les peuples d'Asie (la Chine de Mao incluse) se seraient réappropriées les notions mêmes de socialisme et de communisme développées par Marx et les auraient accommodées selon les caractères desdits peuples, dont les valeurs traditionnelles seraient complètement différentes des nôtres ? Quoi qu'il en soit le lecteur est saisi alors d'un immense vertige : si la règle du « tout est relatif » doit s'imposer, y compris dans ce qui régit chacune des sociétés, alors oui, l'aspiration à une harmonie universelle devient un rêve, une utopie, et l'individualisme, réalisé collectivement dans un groupe, impossible à vaincre !
Car ce qui frappe aussi à la lecture de ces nouvelles c'est que, si elles s'appliquent à la société nord-coréenne, elles peuvent aussi très bien être transposées à nos sociétés occidentales et que la tentation d'un Etat fort, et d'un capitalisme sauvage n'a jamais été aussi forte ! (3)
A quel triste monde ne nous préparons-nous pas ?
-1 ce n'est pas le lieu ici de développer toutes ces notions concernant le travail, pourtant je me sens si proche de cette théorie fortement décriée, mais qui pourtant à analyser de près n'est pas forcément une utopie, celle préconisée par quelques socialistes français du 19ème siècle « travailler deux heures par jour, ce serait suffisant … à rapprocher aussi de cette étude américaine où le maximum que peut supporter un humain pour son équilibre est de travailler au plus 35 heures par semaine …
-2 Je sais bien que c'est maintenant très politiquement incorrect de parler de ce philosophe allemand, pourtant il n'a jamais été autant d'actualité !
-3 Ceci nécessiterait un trop grand développement qui n'est pas de mise dans le cadre de ce seul aperçu critique sur ces nouvelles de Bandi.