Aki Shimazaki Mitsuba Takashi Aoki, cadre supérieur d'une grosse firme japonaise, Goshima, voit son destin basculer lorsque, il tombe amoureux d'une réceptionniste remplaçante, Yuko, alors qu'on lui propose une promotion, aller à Paris. Tout pourrait lui sourire d'autant que Yuko est elle-aussi amoureuse de Takashi. Mais voilà, comme dans l'opéra classique, le fils du directeur de la banque qui possède Goshima a le coup de foudre pour Yuko et veut l'épouser. Les pressions sont alors très fortes sur Yuko qui se voit contrainte à un tel mariage. Le sort de Takashi est scellé et il n'aura d'autre choix qu'obéir à ses supérieurs jusqu'au jour où ... On m'avait prévenu, ce livre quand on met le nez dedans on n'a de cesse d'aller jusqu'au bout. Et c'est vrai, merveille de la traduction, simplicité de l'action ou fascination pour cette histoire d'amour, ou peut-être même tout cela combiné, toujours est-il que ce livre se laisse lire, dévorer, sans qu'on n'ait envie d'en abandonner la lecture. Mais par delà la fraîcheur de l'intrigue amoureuse, admirons au passage cette merveilleuse pudeur qui l'entoure, il y a tout une description fascinante de la société japonaise ; à commencer par ce désormais légendaire attachement au monde de l'entreprise : elle est tout, c'est par elle qu'on vit, c'est aussi par elle qu'on doit avoir sa vie privée, et l'auteure nous explique très bien cette main mise de l'entreprise sur le citoyen, qu'il soit simple ouvrier ou cadre supérieur : c'est une façon pour le japonais de laver son honneur de la défaite que les armes lui ont infligée lors de la seconde guerre mondiale ; et servir son entreprise pour qu'elle soit la meilleure non seulement au Japon mais aussi dans le monde c'est participer de cette nécessaire revanche. Touchants alors tous ces personnages qui se débattent ou se sont débattus dans ce combat que d'une façon presque grandiloquente on pourrait qualifier de cornélien : comment concilier cette obéissance à l'entreprise avec ses propres aspirations au bonheur : Takashi en fera le douloureux apprentissage comme sa mère et son père ont été obligés de le faire. Yuko, elle-aussi, consentira au plus implacable des sacrifices ; mais dans tous ces personnages ce qui est frappant c'est cette absence de pathos, de mélos romantique auquel cède tant et tant de romanciers ; c'est plus que de la pudeur, c'est une abnégation librement consentie jusqu'à ce moment où ... Ils sautent le pas, ils découvrent qu'ils peuvent très bien servir leur pays d'une autre façon et que c'est aussi prendre d'une autre manière sa revanche sur l'Occident ! Un très beau petit roman dont la littérature japonaise et universelle peut s'enorgueillir ... avec cette conclusion momentanée, le titre, le nom d'un café où comme tant et tant d'amoureux se donne rendez-vous ; et ce nom, "trèfle", autre symbole de l' aspiration au bonheur !
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