Hubert Haddad : Palestine
Cham, soldat israélien, et victime d’une embuscade, va se confondre avec Nessim, le palestinien ; il va connaître les humiliations et les souffrances qu’Israel fait subir aux Palestiniens.
Etrange roman !
Par cette confusion si savamment calculée entre Cham et Nessim, mais surtout par ce symbole qu’elle revêt : l’unité entre deux peuples originaires de la même terre est-elle possible ; et la fin sur un point d’interrogation au doute terrifiant n’apporte même pas la réponse souhaitée … à moins qu’elle ne signe un constat d’échec définitif.
Mais roman poignant.
Les personnages féminins sont d’une beauté extrême ; la mère de Nessim, l’aveugle Asmahane, veuve malgré elle, parce que son mari a été une injuste victime des Israéliens, qui ne veut pas continuer à vivre après qu’ait été détruite sa maison, le seul lien matériel qui l’unissait encore à son mari. La fille, Falastin, sans doute le personnage le plus émouvant, d’une vérité absolue dans cet amour quasi incestueux qu’elle porte pour son frère, mais aussi dans cette idéalisation qu’elle fait de son père, elle qui a assisté à son assassinat et qui a été éclaboussée de son sang. Etonnant comme elle porte en elle toute l’intensité dramatique des héroïnes méditerranéennes !
Les personnages masculins ne sont pas en reste, tranchés pour certains qui ont pris position pour un radicalisme allant jusqu’à l’attentat suicide, ou tranchés encore pour ceux qui prônent le pacifisme et souhaitent ardemment la coexistence des deux nations sur le même territoire. Et il y a ces personnages qui oscillent entre les deux pôles, et représentés parfaitement par Cham/Nessim.
Il ne faut pas non plus oublier ces petits personnages, ceux qui font la vie quotidienne, ce porteur d’eau ou ce photographe qui se trouvent pris dans l’engrenage de la fatalité de la violence ; ils contribuent à rendre encore plus douloureuse cette atmosphère qui marque tout le roman.
Atmosphère lourde, où la tension ne se relâche jamais, où la violence et la souffrance se croisent, se mêlent sans cesse ; et sans doute le pire, l’espoir lui-même de la paix, d’une vie enfin rassérénée, est totalement anéanti par ce déferlement de violences qui semble ne jamais devoir s’arrêter.
Roman qui pourrait très bien être aussi témoignage, mais dont la valeur et la force aussi résident dans une écriture sobre d’où a été bannie volontairement toute fioriture, tout ce qui pourrait distraire de ce monde cruel décrit.
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