La vie contre le nucléaire

C’est vrai qu’elle est revêche, l’Eva Joly, certains lui trouvent même l’intransigeance trop … rigide.

C’est vrai qu’elle est tout sauf politicienne, et qu’elle ne sait absolument pas manier l’entregent politique.

Et l’on s’en plaindrait ?

Que demande-t-on à la fin à une femme ou à un homme politiques, si ce n’est de ne pas mentir et de tenir ferme sur ses principes : depuis le temps que la Droite, de Chirac à Sarkozy nous ment – quand aura-ton le courage de dresser le catalogue de tout ce que ces deux lascars nous ont promis et qu’ils n’ont évidemment pas tenus ? – on devrait quand même se méfier quelque peu, non ?

Or voilà, il y a quelques principes sur lesquels le socialisme ne devrait absolument pas transiger : l’indépendance absolue du politique par rapport au secteur industriel privé, ce dernier n’ayant absolument pas à dicter ses prétentions ; à quoi servirait-il alors de « gueuler » contre toutes les manœuvres des lobbyistes à l’Assemblée Nationale et de s’incliner devant leur dictat lorsqu’il s’agit du nucléaire. Un texte d’accord politique avait été signé, on peut en penser par ailleurs ce qu’on veut, par le PS et EELV, sur l’abandon du MOX, et voilà que sous pression d’AREVA ou d’EDF, ce passage de l’accord est abandonné sans même que l’EELV en soit informé ! Attendez, il y a de quoi être furibard, et quand on est tout sauf politicien, alors c’est normal qu’on fasse la gueule, et je comprends complètement Eva Joly.

Sur le nucléaire en général, il me semble complètement inconcevable que des gens qui se prétendent intelligents, qui assurent vouloir le bien du « peuple » n’osent pas se démarquer une bonne fois pour toutes : reconnaître que le nucléaire civil (comme le militaire, mille fois hélas !) est une aberration scientifique, serait la moindre des choses après les tristes expériences de Tchernobyl ou de Fukushima ; que les responsables de droite ne veulent pas remettre en cause cela se comprend dans leur logique industrielle et de profit à court terme (mais entre nous soit dit le jour où ils mourront comme tous les autres, victimes des radiations et autres gentillesses que nous réserve le nucléaire, alors il ne sera plus temps pour eux de le regretter, les billets de banque accumulés dans des coffres sans doute inviolables ne les sauveront pas pour autant !) ! Mais que des socialistes continuent de suivre des vieux barbons, comme Rocard qui vieillit de plus en plus mal, et cèdent au lobby nucléaire, alors là je ne comprends plus rien du tout au monde politique dit de gauche : car, accepter des sacrifices financiers énormes (le nucléaire coûte très cher, c’est des millions et des millions que gaspillent les responsables de Bouyghes avec les malfaçons, dans la construction de l’EPR), alors qu’avec ces sommes on pourrait tant et tant faire pour les 8 millions de Français qui vivent en dessous du seuil de pauvreté en France, ce à quoi devraient s’employer les forces de gauche ; car (et de deux), accepter de jouer avec la santé non seulement des Français mais aussi de la planète au prétexte qu’il faut sauver quelques dizaines de milliers d’emplois (cela ce serait le prétexte officiel d’AREVA, mais la réalité serait toute autre !) : cela ne m’amuse même plus de constater que le capitalisme est capable de créer des tas de merde (pardon, parfois il faut savoir être grossier pour sortir des vérités premières), et de nous les imposer avec une telle prétention et un tel aplomb qu’on n’a même plus le courage de remettre en cause ces produits (combien de temps a-t-il fallu avant que l’amiante ou un médicament comme le Médiator ne soient interdits ?), au prétexte qu’il faut sauver les emplois de ceux qui créent ces produits … comme si la reconversion des travailleurs était une chose impossible … amusant, le capitalisme est capable de se servir de cette arme de reconversion lorsqu’il s’agit pour lui de supprimer des entreprises qui ne font pas assez de profits, mais la gauche elle s’interdirait de telles mesures lorsqu’il s’agirait de la survie de nos enfants et petits-enfants.

Je regrette très profondément qu’on m’ait dévalisé un jour mon grenier, et que j’aie perdu ma collection complète de la « Gueule ouverte », car Fournier a écrit dans ce mensuel (si ma mémoire est bonne) aujourd’hui disparu des articles que tout politique un tant soit peu cohérent avec son engagement se devrait de lire.

Alors oui je comprends totalement l’écoeurement d’Eva Joly, et les doutes qui ont du l’assaillir. Et je m’interroge sur la nature réelle de ces responsables politiques de gauche (PS en tête et aussi certains tacticiens d’EELV) qui se montrent si frileux vis-à-vis du nucléaire.

Et le peuple de gauche (comme celui de droite s’il ouvre les yeux pour voir à quel point leurs dirigeants sont corrompus dans tous les domaines, et pas seulement financiers !) ne se sent-il pas quelque peu floué ?