Imaginez une petite ville tchèque, Theresienstadt, dont les nazis avaient fait un de leurs sinistres lieux d’extermination ; imaginez encore, un de ses enfants, au passé morbide déjà dans une prison communiste, et qui revient dans sa cité natale ; là il retrouve un certain Lebo, qui est obsédé par l’idée de montrer que cette ville est autre chose qu’un lieu de mémoire du passé. Va se créer une communauté qui attire nombre de marginaux du monde entier, avec comme de juste ses héroïnes, Sara en sera l’une d’elles.
Mais voilà, cette nouvelle vision gêne les autorités ; la communauté sera alors démantelée. Notre héros sera « exporté » vers la Biélorussie où des opposants au régime veulent tenter la même expérience de communauté … mais là-aussi c’est un échec.
Bon, si vous vous attendez à une « révolution romancière » telle qu’a pu tenter de l’accomplir le nouveau roman avec des écrivains comme Butor, vous risquez fort d’être très très déçu ! « L’atelier du diable » tant dans sa conception, son architecture que son écriture n’a absolument rien de nouveau,
et ce « New age » évoqué dans la quatrième de couverture ne nous offre guère de nouveauté.
Les thèmes développés ont été déjà tellement traités ! Les horreurs commises par les nazis, l’exploitation quasi touristique qui en a été faite (ne soyons pas choqués, ou ne jouons pas les faux prudes : les marchands du temple sont toujours là où il y a de l’argent à faire, au Vatican comme au Mont Saint Michel, pour ne citer que quelques lieux parmi tant et tant d’autres !), la dénonciation du totalitarisme communiste, ou en parallèle le conformisme familial petit-bourgeois : tout y est.
Cela ne veut pas dire pour autant que ce roman est dénué de tout intérêt ; non, et pour cette raison principale que les faits racontés et qui souvent s’opposent, même s’ils sont connus ou nous en rappellent d’autres similaires, sont par eux-mêmes porteurs d’interrogation ; l’auteur s’en voudrait de trancher, mais on ne peut qu’applaudir à ce qui peut tellement ressembler à des prises de position : la haine de la violence, au détriment des êtres humains, le rejet des phénomènes de masse (les scènes où la population civile applaudit et encourage les autorités à démanteler la communauté sont particulièrement significatives).
Mais surtout le héros, malgré un passé plus que trouble, sait nous émouvoir ; il a la franchise de l’innocence perdue et tellement re-souhaitée ! Toutes ses aventures ont ce goût amer de la recherche d’un autre temps, celui où seraient gommés tous les conflits dans lesquels il est, volens nolens, impliqué.
Ce JáchymTopol, en tout cas, ne laisse pas indifférent, et, lorsqu’on a refermé son roman, on a a vraiment envie d’en connaître un peu plus sur cet auteur et sa production de romancier.
Editions Noir sur Blanc, 2012, 169p., 16€
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