Que d'émotions !
Cette semaine, un imprévu, quelque peu désagréable : dans un chantier de démolition dans notre bonne ville de Rennes, un engin, sans doute payé par un concurrent, a sectionné un câble rempli de fibre optique appartenant comme de juste à mon opérateur SFR. On imagine les conséquences, l'ensemble du réseau SFR de Rennes et des alentours hors circuit, des milliers d'usagers sans box et donc sans téléphone fixe, sans internet et sans télévision, du mercredi soir au vendredi matin, et pour certains même vendredi soir ! Et dire qu'il n'y a même pas eu la révolution !
Remarquez le téléphone fixe, on s'en passe, pas de nouvelles, bonnes nouvelles ; internet somme toute n'est pas indispensable à notre bien être, il nous arrive d'en être privé pendant de nombreuses périodes et on ne s'en porte pas plus mal ! Quant à la télévision ? Nous manque-t-elle réellement ?
Si un petit peu, car si je n'avais pas pu regarder Mezzo mardi ou vendredi, j'aurais manqué deux très grands moments musicaux.
Je vais les prendre par ordre chronologique et … paradoxalement ante chronologique ; et commencer donc par le concert de Vendredi dernier, de 20h30 à 22h : Le requiem de Verdi, retransmission d'un concert donné à la Scala de Milan en 2012, sous la baguette de Daniel Barenboim : s'il y a des musiciens à qui on devrait ériger une statue, lui, il en ferait sûrement partie ! Connaître la partition par cœur, cela m'ébahit toujours, mais lorsqu'il s'agit d'une pareille œuvre, la stupéfaction est encore bien plus grande : 1h30 de musique, un chœur de plus de cent personnes, un orchestre d'au moins 80 musiciens et quatre solistes … c'est proprement fabuleux, et ce n'est pas la performance que j'admire en tant que telle, mais bien pour ce qu'elle permet au chef de réaliser : il en résulte une osmose entre lui et tous les acteurs musicaux, et inversement tous les musiciens, solistes et choristes font encore davantage corps avec lui ; sont alors mises en valeur toutes les nuances de l'interprétation qu'il veut donner de cette œuvre ! Et quand on possède comme lui la capacité à découvrir tout ce qui peut se cacher derrière une partition, alors on est certain d'avoir de très grands moments.
Osmose ai-je écrit ? Quand vous le voyez prononcer distinctement les paroles que doivent chanter les choristes, comment ceux-ci ne pourraient-ils pas alors rendre le texte (les paroles, mais aussi toute la musique dans laquelle ils s'inscrivent) exactement comme le comprend le chef et comme le perçoivent aussi les spectateurs que nous sommes ! Quand nous le voyons accompagner de la tête et de son expression du visage les solistes, comment pourrions-nous un instant mettre en doute la pertinence de l'interprétation qu'il a imprimée à l’œuvre ?
Les solistes ! Ah oui,parlons-en ! Vous me direz qu'il n'y a rien de plus subjectif qu'une voix ! Pourtant, j'aimerais bien rencontrer quelqu'un qui reste insensible à la sonorité de cette fabuleuse mezzo-soprano qu'est Elina Garanca ! Des graves flirtant avec le plus grand bonheur avec le timbre de l'alto, et des aigus dignes des plus grandes sopranos : impossible de ne pas tomber sous le charme d'une telle soliste qui réussit ce véritable tour de force de transformer cette œuvre, véritable opéra d'église en une profonde méditation sur la mort… au contraire de sa collègue soprano, Anja Harteros, qui n'arrive pas à s'affranchir totalement de l'atmosphère opéristique et qui reste trop souvent dans le registre de l'opéra lyrique verdien, ce qui nuit malheureusement à la qualité des quelques quatuors vocaux qui parsèment l’œuvre !
Je ne peux ne pas mentionner les deux voix d'homme ! On connaît la qualité du ténor Jonas Kaufmann, il est sans doute inutile de s'attarder sur lui, par contre la voix du basse, René Pape, est à l'instar de celle d'Elina Garanca, exceptionnelle ; il vous prend, comme elle, au plus profond de vos tripes.
Mais que seraient toutes ces voix exceptionnelles, choristes compris, ces instrumentistes hors pair, s'il n'y avait une telle musique ! J'ai mis un certain temps à rentrer dedans, mais depuis que j'ai pénétré ses arcanes alors …
Etonnantes ces influences russes qui parcourent la partition : des choeurs très proches de ceux de Boris, par exemple, ou encore ce Dies irae, reprise invraisemblable des Danses Polovtsiennes du Prince Igor de Borodine ; étonnantes encore les évocations des propres opéras de Verdi, le début du « Libera Me » fait tellement penser à la mort de Desdémone ou encore à la Traviata. Mais cela, c'est sans doute pour le puriste, car en fait à écouter ce Requiem on a l'impression de découvrir une toute autre personnalité du compositeur, tout aussi fascinante que celle de ses opéras … au point qu'allez savoir pourquoi, il m'a plu d'imaginer que nos télévisions, faisant enfin preuve de discernement culturel, pourraient proposer à leurs auditeurs et spectateurs de tels chefs d’œuvre aux heures de grande écoute, plutôt que de leur imposer l'indigence de nombre d'émissions dites de divertissement !
Je crois savoir qu'il existe un enregistrement sur deux CD de cette interprétation de Daniel Barenboim ! Alors si d'aventure vous avez manque ce très grand moment sur Mezzo, n'hésitez pas un instant à vous la procurer … et je suis certain de recevoir de nombreux mails de remerciements de vous autres lecteurs !
Il y a eu aussi cette semaine, le mardi, sur Mezzo une autre œuvre dont j'aurais voulu vous parler … mais hélas, Verdi m'a trop occupé, alors ce sera pour plus tard !
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